Roch Oddo passe la barre du neuvième degré avec « The Never Ending Story 1+2+3 »

La machine Roch Oddo, 27 ans, grand frère de Enzo Oddo, s’offre son premier 9a en répétant la voie très particulière : « The Never Ending Story 1+2+3 » à Magic Wood. Il revient avec nous sur cette performance et sa passion pour le bras de fer.

Roch Oddo « The Never Ending Story 1+2+3 »
Roch Oddo dans le crux de « The Never Ending Story » ! Photo : Samuel Tuor

Peux-tu te présenter et raconter ton parcours dans le monde de l’escalade ?

Je m’appelle Roch Oddo, je suis un niçois spécialiste du bloc extérieur bien que je vive dans une pure région de falaisiste on a quand même quelques très beaux secteurs (Annot surtout, mais aussi Varazze, la Gordolasque..) et je voyage beaucoup. J’ai toujours été entouré de grimpeurs (toute ma famille grimpe) mais malheureusement je n’ai pas du tout accroché et je n’ai découvert le sport qu’à 18 ans. Un des grands plaisirs que je trouve dans la grimpe est la recherche du dépassement de soi. Donc après quelques années à grimper en dilettante (et des blessures à répétitions dues à mon irrégularité et mon hygiène sportive douteuse à coup de bière de mi-séance) j’ai décidé de changer d’approche et de me pousser un maximum dans l’aspect physique de la discipline. J’ai attaqué l’entraînement de façon extrêmement sérieuse en 2017, tout en passant un maximum de temps en trip bloc !

Quel est ce 9a si particulier que tu viens de répéter et pourquoi l’as-tu choisi ?

Je viens de répéter « Unendliche Geschichte/The Never Ending Story 1+2+3 ». C’est un 9a hybride bloc/falaise. Il commence par un bloc très physique dans du plafond en 8B+ bloc (NES 1+2) ouvert par Chris Sharma. Ce bloc finit sur une bonne prise au milieu de la face, la chute devenant ensuite difficilement acceptable. Peter Würth a pu ouvrir un passage rétablissant au sommet du bloc en commençant la voie équipé d’un baudrier, puis en clippant une corde entre les parties 2 et 3 dans le repos et en finissant comme une voie d’escalade sportive classique sur spits. L’effort est alors un effort de résistance et la cotation est une cotation de falaise qui selon moi correspond mieux pour la totale. Au départ j’étais parti pour faire uniquement la partie 2, j’ai mis un essai et j’ai compris que je devais tout faire. C’est la meilleure escalade que j’ai jamais pratiquée. Le gneiss poli par l’eau a créé ces formes incroyables qui donnent une escalade 3D sur des prises parfaites. Chaque partie est un monument d’escalade, de la résistance de la première, au célébrissime crux de la deuxième jusqu’au jeu d’équilibre de la dernière. L’assemblage des 3 est un moment magique.

Comment es-tu passé de 8b à 9a ?

Je réalisais déjà des 8B bloc, ce qui est aux alentours de 8c+ voie, et j’ai encore progressé physiquement pour réaliser 1+2. Il me manquait une composante essentielle en revanche : de la rési. Après avoir échoué 2 fois dans la troisième partie au début de l’été j’ai attaqué un gros cycle de rési qui a payé !

Comment s’est déroulée ta préparation pour ce projet ?

La prépa était assez compliquée, entre les 2 trips j’avais une inflammation à une poulie qui m’empêchait de broyer les prises. J’ai contourné ça en faisant des circuits sur des plus grosses préhensions que je pouvais prendre en position plus ouverte mais avec du lest. Pas idéal je pense mais ça a suffi. Heureusement je pouvais quand même arquer main droite pour m’entraîner pour le crux, et la poulie a récupéré juste à temps pour le projet !

Quels sont tes projets futurs ?

Dans un futur proche il y a moins d’escalade pour moi, j’attaque ma dernière année de médecine qui est particulièrement difficile. Je vais essayer de me maintenir en forme, le projet qui me fait le plus rêver c’est de loin « The Finnish Line » à Rocklands. Mais il va falloir encore quelque temps et de l’entraînement je pense, le problème avec les projets lointains c’est qu’il faut être efficace rapidement. Un jour j’espère ! J’aimerais également réaliser « The Big Island » à Bleau, c’est la ligne mythique chez nous je pense. Et après j’ai une foule de trucs moins durs qu’il faut que je finisse ou que j’essaie vers chez moi ou ailleurs mais pour ça la liste est trop longue…

Tu fais en parallèle de l’escalade du bras de fer en compétition et tu es qualifié pour les championnats du monde en novembre, est-ce une discipline complémentaire selon toi à l’escalade ?

Oui j’ai essayé en club à la fin de l’année dernière, on en faisait un peu avec la bande de Val de Grimpe (la salle locale) pour rigoler à la fin des séances avant. Déjà je trouve que c’est vraiment drôle à pratiquer, c’est bonne ambiance, tu charries les potes et tu forces un bon coup. A démarrer doucement par contre, sinon gare au douleurs ! Et oui ça se marie super bien avec l’escalade, c’est exactement les mêmes groupements musculaires. Bien que ça utilise un peu plus de poignet et un peu moins de doigts il faut des gros avant-bras et un gros dos, et ça les grimpeurs connaissent ! Ça fait vraiment progresser en compression je pense, et c’est bien plus sympa que de faire des tractions pour la 500ème fois.

Roch Oddo bras de fer
Roch Oddo, champion de France du bras gauche de bras de fer en -75kg ! Photo : Vanessa Llados